source image : Death proof (Quentin Tarentino, 2007)
A première vue, il semblerait normal que les mesures prises par nos gouvernements pour améliorer les comportements des automobilistes tiennent compte des connaissances fondamentales sur le comportement humain.
Pourtant, en France, la sécurité routière est principalement une affaire politique (elle est gérée notamment par le ministère de l’Intérieur). C’est bien dommage, car si l’on utilisait ce que l’on sait des principes de base qui gouvernent les comportements humains, nous pourrions proposer des mesures politiques bien plus efficaces…
La science du comportement : un domaine encore peu connu en France
Le champ de recherche qui s’intéresse aux principes du comportement humain et aux mécanismes de l’apprentissage s’appelle la science du comportement. B. F. Skinner (1904-1990) est l’un des psychologues qui est à l’origine de ce champ de recherche et aujourd’hui plusieurs centaines d’études sont publiées chaque année dans de nombreuses revues scientifiques spécialisées. Cette science a pour visée l’application éthique de ses recherches pour améliorer les comportements d’intérêt social.
Malgré l’étendue de ses domaines d’application et sa reconnaissance auprès de la communauté scientifique internationale, la science du comportement est un domaine encore peu connu dans notre pays. Parmi ses nombreux champs d’application : la santé, le handicap, le travail, le social, l’économie, l’écologie, ou encore… la sécurité routière.
La science du comportement au service de la politique de sécurité routière
Pour bien comprendre comment cette science du comportement peut être appliquée à la sécurité routière, nous allons prendre trois exemples de principes de base du comportement issus de la recherche.
Principe n°1 : l’apprentissage par les conséquences
- En résumé : L’être humain apprend des conséquences de ses comportements.
- Le fait que nos comportements soient modifiés par leurs conséquences est un principe de base qui concerne tous les êtres humains, sans exception.
- Dans de nombreux pays dont la France, les comportements des automobilistes sont modifiés principalement par le biais de conséquences « désagréables » (méthodes répressives). Exemples de conséquences qui visent à diminuer les comportements inappropriés des automobilistes : contraventions, radars, prisons, menaces, réprimandes, etc.
Ce que la recherche en science du comportement nous apprend au sujet des apprentissages par des conséquences « désagréables » (ou méthodes répressives) :
- Effets à court terme (après le radar, je ré-accélère ; nombreuses récidives).
- Répression différée = perte d’efficacité : les contraventions reçues par courrier plusieurs jours après l’infraction ont beaucoup moins d’impacts sur les comportements que si la sanction tombe dans les 3 secondes qui suivent l’infraction (actuellement des expérimentations sont en cours pour évaluer les effets d’alertes envoyées instantanément par sms sur les smartphones des contrevenants).
- Apprend à ne pas faire certains comportements, mais n’apprend pas forcément des comportements alternatifs adaptés.
- Réactions émotionnelles impactant la santé et encourageant les comportements agressifs.
- Répression : « mauvais » modèle de comportement donné aux automobilistes.
- Habituation : au bout d’un moment, la répression perd de son efficacité.
En parallèle d’un système répressif, il existe des stratégies d’apprentissages basées sur les conséquences « positives ». Par exemple :
The speed camera lottery - The fun theory
Ce que la recherche en science du comportement nous apprend au sujet des apprentissages par des conséquences « positives » :
- Effet et apprentissage à long terme (les comportements se maintiennent plus longtemps en mémoire).
- Apprend les comportements appropriés, et se focalise moins sur les mauvaises conduites.
- Pas de réactions émotionnelles impactant la santé (au contraire).
- Pas d’agressivité (au contraire).
- Conséquence « positive » : « bon » modèle de comportement donné aux automobilistes.