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La moitié des infractions liées à l’alcool n’entraîneraient pas de perte de points

Sécurité routière

Les mauvais résultats en matière de sécurité routière pour le mois de novembre, dévoilés jeudi 10 décembre, n’étonnent guère l’accidentologue Claude Got. Pour cet ancien expert du Conseil national de la sécurité routière, ayant démissionné de cette instance pour marquer son désaccord avec la politique du gouvernement, « ils sont la sanction d’une politiqueinsuffisamment interministérielle. » Il déplore que le ministère de l’intérieur « dissimule des rapports qui montrent des dysfonctionnements, au lieu de remédier à ces derniers ». Il estime notamment que les sanctions, en cas d’infractions au code de la route, ne sont pas correctement appliquées.

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« Nous avons appris cet été que 46 % des infractions constatées en 2010 n’avaient pas donné lieu à une perte de points », indique-t-il, en faisant allusion au Rapport sur l’écart entre le nombre d’infractions constatées et le nombre d’infractions générant un retrait de points de permis de conduirerédigé par deux inspecteurs généraux de l’administration (IGA), Jean Colin et Jean-Marie Le Gallou ; le rapport a été produit en 2012, mais jamais rendu public par le gouvernement. En septembre, le Journal du dimanche l’a fait « fuiter ».

Pour le scientifique, rien n’aurait changé, et il le démontre sur son site. Il a refait les calculs des inspecteurs, avec les seuls points de permis retirés en cas d’infractions liées à l’alcool.

Il constate qu’en 2014, si l’on en croit le bilan statistique de l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière, il y a eu un total de 319 264 dépistages positifs. On a dénombré 167 067 délits (taux supérieur à 0,8 g/l de sang ou à 0,40 mg/l d’air expiré), et 92 736 contraventions (taux compris entre 0,5 et 0,8 g/l de sang ou entre 0,25 et 0,40 mg/l d’air expiré). « Cela signifie que 259 803 conducteurs auraient dû se voir retirer des points », explique M. Got.

Pas de retrait de points dans 52% des cas

Le bilan statistique indique que pour les délits, 501 732 points ont été retirés et que pour les contraventions, 433 428 points ont été retirés, ce qui fait un total de 935 160 points retirés. Délits et contraventions entraînant un retrait de six points, il faut diviser ces 935 160 points par six, pour obtenir le nombre de personnes réellement sanctionnées : il est de 155 860, un total inférieur aux 319 264 dépistages positifs.

Comment se fait-il que dans 52 % des cas, il n’y ait pas eu de retrait de points ? M. Got estime que les infractions commises par des étrangers ou des personnes conduisant sans permis sont marginales (3 % des cas).

Il se demande si les classements sans suite sous condition de suivre immédiatement un stage d’éducation routière seraient une cause déterminante. Les procureurs peuvent en effet prescrire aux forces de l’ordre de proposer cette solution au contrevenant qui, ainsi, ne perd pas de points.

Il rappelle que les inspecteurs de l’IGA s’étaient étonnés de cette mesure. « Il peut ainsi paraître paradoxal de constater que le contrevenant n’échappe que rarement au retrait d’un ou deux points suite à des infractions mineures à la vitesse, mais qu’en matière d’alcoolémie contraventionnelle, qui entraîne en principe un retrait de six points, il peut y échapper quasi systématiquement en cas de classement sans suite sous condition », écrivaient-ils.

Une « pratique variable »

Ils jugeaient la situation problématique « au regard de l’équité entre contrevenant, au regard de l’efficacité de la politique de sécurité routière alors que le quart des tués sur la route ont l’excès d’alcoolémie pour cause, et par le fait que l’absence de retrait de points ne fait pas apparaître l’infraction au système national des permis de conduire (SNPC), ce qui rend problématique le constat d’une éventuelle récidive ».

M. Got croit savoir « que cette pratique est variable d’une juridiction à l’autre », mais il réclame des données chiffrées. Il se demande aussi dans quelle mesure la déperdition de points est liée aux problèmes d’interface entre système judiciaire et système administratif, mis en évidence par le rapport de 2012. « Après condamnation liée à une contravention, est-ce que l’officier de police judiciaire transfère la décision de retrait de points au SNPC ? Après condamnation suite à un délit, est ce que les greffes des tribunaux font de même ? », demande-t-il. « Les deux inspecteurs avaient demandé qu’il y ait un suivi à leur rapport. Mais qu’en a-t-il été ? », interroge-t-il.

 


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