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Le décret d’application publié la veille au Journal officiel semble avoir pris tout le monde de court. Au point que le ministère de la justice s’est même trompé en affirmant que les délits routiers étaient concernés. Faux ! Ces délits sont bien passibles de peines d’un an d’emprisonnement au plus – la limite retenue pour entrer dans le champ de cette transaction pénale – mais ils dépendent du code de la route et non du code pénal ni du code de la santé (ce dernier est spécialement invoqué pour l’usage des stupéfiants). Certains magistrats laissent alors entendre que les délits routiers auraient été tout simplement oubliés en route lors du débat parlementaire.
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Même le député socialiste Dominique Raimbourg semble tomber des nues. Rapporteur du projet de loi sur la réforme pénale de 2014, auteur de l’amendement parlementaire à l’origine de l’extension de cette pratique de la transaction jusqu’ici réservée aux douaniers, et président du comité de suivi de la mise en œuvre de la réforme pénale, il n’avait pas été informé de la parution de ce décret. Un texte pourtant signé par le premier ministre Manuel Valls et par quatre des membres du gouvernement (la garde des sceaux Christiane Taubira, le ministre du budget Michel Sapin, le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve et la ministre des Outre-mer George Pau-Langevin), mais publié sans la moindre publicité compte tenu de la peur des politiques dès qu’on aborde la question de la répression de l’usage de cannabis.
Du côté des magistrats ou de la place Beauvau, l’information ne semble pas avoir été beaucoup plus claire. « Nous n’avons eu aucune instruction du directeur général de la police nationale dans les services », explique Jean-Marc Bailleul, du Syndicat des cadres de la sécurité intérieure (SCSI), un syndicat de policiers.
Chez les procureurs, appelés à autoriser ces transactions pénales que les officiers de police judiciaire proposeront aux personnes plutôt que de les renvoyer au tribunal, on se montre prudent tant qu’une circulaire de la chancellerie ne vient pas donner d’orientations générales sur la pratique de ce nouvel instrument. Mais au ministère de la justice, on préfère attendre de voir comment les parquets et la police s’emparent de la transaction pénale avant de songer à établir une circulaire. Bref, le brouillard n’est pas prêt de se dissiper.